01/10/24

« Une exploration haletante de la vie de réfugiés d’Arendt et des siens »

Recension de Parias de Marina Touilliez par Alexandre Jadin dans Philosophie Magazine.

Hannah Arendt qualifiait d’« assez heureuses » ses années d’exil en France, de 1933 à 1941. Fruit d’une enquête biographique minutieuse, nourrie d’archives inédites, le remarquable récit de Marina Touilliez nous permet de comprendre cette pudique tournure. Car l’exil parisien pour la jeune Arendt est loin d’être une sinécure : aux difficultés pour se loger et se nourrir s’ajoute le bourbier bureaucratique. D’abord confrontée à l’imbroglio classique – « sans carte de travail, pas de contrat ; sans contrat, pas de carte de travail » –, elle parvient à enchaîner les petits boulots. Au logement du 10, rue Dombasle, Arendt rencontre tout un monde soucieux de faire vivre une « autre Allemagne » que celle portée par la croix nazie. Bertolt Brecht, Walter Benjamin et tant d’autres forment là une communauté intellectuelle et amicale – autour de laquelle l’autrice nous fait tournoyer –, leur permettant de surmonter leurs conditions de vie de « parias », qui s’aggravent. La IIIe République finissante, métastasée par l’antisémitisme et la xénophobie, qualifie les réfugiés d’« indésirables », avant de les interner dans des camps. C’en est fini de la chaude amitié de la rue Dombasle où s’était réunie la « tribu » : détenue au camp de Gurs, Arendt s’enfuit pour poursuivre son œuvre aux États-Unis. Dans Les Origines du totalitarisme (1951), elle écrit : « L’homme en tant qu’homme n’a qu’un droit qui transcende la diversité de ses droits de citoyen : le droit de ne jamais être exclu des droits. » Développant les implications de ce « droit d’avoir des droits », Marina Touilliez livre une exploration haletante de la vie de réfugiés d’Arendt et des siens (...).

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Marina Touilliez