« Un jour, un livre : aujourd’hui, au diable la résilience, "macabre" et "indécente" »
Recension de Contre la résilience de Thierry Ribault par Clara Guillard dans Libération.
La résilience est partout : dans l’intitulé de la dernière loi environnement (Climat et résilience), dans la bouche d’Emmanuel Macron (contre le terrorisme, la résilience). Utilisée à l’origine dans le domaine de la physique pour désigner la capacité de matériaux à retrouver leur forme originale après un choc, cette notion signifie aujourd’hui la faculté d’un individu à faire face aux malheurs : un mot magique pour aller mieux.
Mais pour Thierry Ribault, économiste, chercheur au CNRS, qui lui consacre un essai, elle est au contraire «macabre, indécente, indéfendable». Indécente, car elle ne laisse pas de place au deuil. L’injonction à la résilience est déjà l’inscription dans un futur, qui permet d’enjamber le présent et surtout de s’épargner un inconfortable examen du passé, c’est-à-dire des conditions qui ont conduit à la catastrophe en analysant notamment le cas de Fukushima.
Pour Ribault, la résilience est une façon d’administrer le désastre, «dans laquelle l’horreur de la réalité n’est pas supprimée mais perpétuée». Macabre. La catastrophe serait même une opportunité pour vivre une vie nouvelle : une injonction très en phase avec l’affirmation de l’individu néolibéral, performeur solitaire. Indéfendable. Alors, face à la résilience, Ribault en appelle à retrouver les «chances inconnues de la rage». Non pas celle qui s’indigne sur les réseaux sociaux ou les plateaux télévisés mais celle qui «peut insuffler le commencement vital du refus de penser dans la langue pétrifiée de la société industrielle».
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