« L’écologie politique mutilée par la vague collapsologique ? »
Recension de La Collapsologie ou l'écologie mutilée par Renaud Garcia dans Mediapart.
Un combat doit être mené, qui ne peut être aussi consensuel que présenté par les catastrophistes qui, se refusant à beaucoup plus qu’à des repentirs, ne font que marcher « innocemment, main dans la main, avec la clique qui demandera toujours aux plus humbles de faire des efforts ».
Par son livre paru cet automne, le philosophe Renaud Garcia nous propose une approche critique d’une dame très en vogue depuis quelques années, presque jusqu’à prendre saveur d’exorcisme, la collapsologie. Non pas sceptique quant au constat – le désastre n’est pas pour demain, il est là, et bien installé –, Garcia se réclame plutôt d’une écologie politique et anti-industrielle qui a fait ses preuves sur le plan théorique et dénonce ici un présentisme de bon aloi prisé par de nouveaux prophètes trop parfaitement intégrés et s’appuyant pour l’essentiel sur « un discours foncièrement inconsistant ».
Il est vrai que la compatibilité de ces prophètes avec l’ère numérique, par exemple, aussi bien qu’avec le système médiatique, découle notamment d’une complaisance envers la connectivité globale et les dégâts très matériaux dont elle est la cause croissante, sans compter la déréalisation qu’elle induit, jusqu’à n’être plus rien d’autre qu’un élément du spectacle. Quant au terme « effondrement », qui les rassemble, il ne remplit guère son rôle, il n’est au fond qu’un de ces « mots plastiques » qui « change[nt] de forme en fonction du contexte mais demeure[nt] dans l’ensemble toujours aussi flou[s] ». Les tenants de l’« effondrement » cherchent à capter l’attention du plus grand nombre, et ils y parviennent sans doute mieux que leurs aînés écologistes radicaux, lesquels n’hésitaient pas à désigner l’ennemi capitaliste, ou aussi bien la bureaucratie, qu’elle soit communiste ou libérale (on la voit à l’œuvre ces temps-ci mieux encore).
Renaud Garcia n’a rien à vendre, lui. Ni épouvantail ni rassurrance. À l’injonction la plus caressante il préfère les œuvres littéraires fouillées (Ovide, Ballard, Brunner, Bradbury, etc.) et en chacune il y saisit une fable qui conduit son propos. Ainsi, par des approches successives et un jeu de précautions, il nous amène à contracter un ressenti autant qu’à entendre ses réserves. On voit bien avec lui que sauver le monde ne saurait en rien ne relever que d’une affaire de morale, qu’un véritable procès doit être instruit, qu’un combat doit être mené, qui ne peut être aussi consensuel que présenté par les catastrophistes dont il est question ici, qui, se refusant à beaucoup plus qu’à des repentirs, ne font que marcher « innocemment, main dans la main, avec la clique qui demandera toujours aux plus humbles de faire des efforts ». [...]
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