« Cartouche, itinéraire du premier bandit français »
Recension de Bandits & brigands et entretien avec Patrick Pécherot par Alexis Ferenczi sur le site de Vice.
Louis Dominique et sa bande ont multiplié braquages de diligences, cambriolages et coups d'éclat au début du XVIIIe siècle.
La France sait exporter ses bandits de fiction. Arsène Lupin, le gentleman cambrioleur de Maurice Leblanc adapté par Netflix et porté par Omar Sy, n’est-il pas ce carton d’audience planétaire vendu par la plateforme de streaming et ses chiffres (un poil) romancés ? Un succès qui aura fini par invisibiliser les figures de la rapine hexagonales faites de chair et d’os. Ces destins de « brigands d’honneur » comme celui de Louis Dominique Cartouche qui sévit au XVIIIe siècle avec sa bande et se distingue à grands coups de braquages de diligences et de casses spectaculaires, devenant même un des premiers bandits « médiatisés » dont la courte carrière sera retracée par des chansons et des pièces de théâtre.
« Cartouche, je l’ai découvert probablement comme beaucoup de gamins de ma génération, par le film de Philippe de Broca, quand il est sorti au cinéma [1962], raconte Patrick Pécherot, auteur d’un texte consacré au « prince des voleurs » dans le recueil Bandits & Brigands, (ouvrage publié aux éditions L’Échappée, dans la collection Lampe –Tempête). Pour moi, ça a été un éblouissement. Il m’est apparu dans sa forme sublimée et bondissante [incarné par Jean-Paul Belmondo] mais j’avais aussi été très sensible au changement de ton qui se produit dans le film. De la comédie picaresque de cape et d’épée au drame et cette scène finale qui laisse deviner le sort réservé à Cartouche. »
Avant que ne s’abatte la masse du bourreau un jour de novembre 1721 en place de Grève à Paris, Cartouche aura multiplié les coups d’éclat, forgeant une légende qui l’accompagne encore aujourd’hui de « bandit social ». On le décrit comme un homme rusé, à l’intelligence d’Ulysse, tantôt manipulateur, acrobate, ou séducteur. Pourtant, contrairement à un de ses successeurs, Louis Mandrin, qui redistribuait assez largement le butin arraché aux collecteurs d’impôts, Cartouche ne faisait pas systématiquement ruisseler ses trésors. « Mais il agit sur fond de grogne, de colère sociale et de contestation, suggère Pécherot. Ses actions étaient perçues comme une forme de justice puisqu’il s’en prenait aux figures d’autorité ou aux bourgeois – il n’allait pas s’attaquer aux pauvres, c’est un peu le B.A. BA du métier. Il ne redistribuait pas l’argent volé mais il achetait beaucoup de monde, cabaretiers ou prostituées, et il les payait très bien. De quoi former un réseau qu’on a appelé les ‘Cartouchiens’ et qui lui servaient d’espion ou de relais. »
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