« Arendt à Paris, l’amitié comme héroïsme ordinaire »
Recension de Parias de Marina Touilliez par Jean Birnbaum dans Le Monde des Livres.
Dans un merveilleux essai, Marina Touilliez décrit la constellation solidaire qui entourait la penseuse en exil, au milieu des années 1930.
Jusqu’au bout, Hannah Arendt aura placé l’amitié au cœur de son existence. Il y allait à la fois d’une quête philosophique et d’un engagement vital. « C’est seulement parce que je peux penser avec les autres que je peux également parler avec moi-même, c’est-à-dire penser », notait-elle lors d’un séjour dans les Catskill Mountains, au nord de New York. C’était en 1968, soit sept ans avant sa disparition. Mais c’est en France, trois décennies plus tôt, qu’Arendt a vraiment appris à chérir l’art de l’amitié. Entre 1933, date à laquelle, âgée de 27 ans, elle fuit l’Allemagne nazie, et 1941, année où elle s’extirpe des griffes de Vichy pour gagner miraculeusement les Etats-Unis, quelque chose d’essentiel s’est joué : l’expérimentation de l’amitié comme héroïsme ordinaire.
Un merveilleux livre, paru dans une vaillante maison libertaire, L’Echappée, décrit ce moment comme jamais il ne l’avait été. Son titre : Parias. Hannah Arendt et la « tribu » en France. Son autrice : Marina Touilliez. De cette dernière, nous ne savons rien, sinon ce qu’en dit la quatrième de couverture : après des études de sciences politiques, elle est devenue conférencière, pédagogue. Dès les premières pages s’impose cependant à nous l’impression de la connaître depuis toujours, au point d’éprouver, à son endroit, une immense gratitude. Il suffit d’ouvrir ce volume pour aimer la tendre érudition dont elle enveloppe la maigre troupe d’exilés dont Arendt fit alors partie (...).
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