Le roman de formation d’un « écrivain du peuple », envisagé à travers le prisme de ses lectures : féconde piste de travail que celle suivie par Thierry Maricourt, qui fut un proche de Michel Ragon. Cet ouvrage est une biographie condensée du futur écrivain dans ses lieux successifs et offre des visions touchantes du jeune lecteur.
Une vie d’écrivain se construit par la lecture, cette clé qui déverrouille les entrées du labyrinthe social. Le jeune Michel Ragon se montre un lecteur intrépide. Entre trois nuances de littérature prolétarienne, il s’inscrit dans un réseau où il se fera reconnaître, puisque écrire, « c’est avoir besoin des autres » (Paul Valéry).
« L’autodidacte est un boulimique qui se vautre dans la pléthore des titres », observe Thierry Maricourt. La lecture est un acte de souveraineté, une entrée dans la marche du monde, un temps dérobé au métier de gratte-papier, une rupture avec le monde paysan des origines. Comme on aime dans ce précieux ouvrage les photos du jeune Michel, de sa demi-sœur cambodgienne Odette, venant confirmer l’exotisme secret de cet écrivain des marges, qui signe ses premiers poèmes à Nantes sous les bombes, en 1943... Et ces pages de répertoire où il a noté ses lectures : il a tout lu, ayant tant à dire et à écrire