J’AI LU ÇA (#14). Chaque semaine, les journalistes de « l’Obs » évoquent un détail pêché dans un livre, qui les a fait corner une page. Cette semaine : est-ce que la musculation peut-être anticapitaliste ?

Il y a quelques mois de cela, je me suis aventuré dans ce que les bodybuilders appellent le « big men land », c’est-à-dire l’espace, dans les salles de sport, consacré à la discipline reine de la musculation : le développé couché. Pour ceux qui ne voient pas, c’est de là que sortent des bruits de métal et de souffrance, des « klongs », des « ahhhs » et des « putain-mon-dos ». Pétri de préjugés, je m’attendais à des conversations relativement éloignées des grands débats contemporains. Ce fut tout l’inverse : les deux premières personnes que j’ai croisées étaient plongées dans une discussion politique pointue sur les dérives autoritaires du macronisme ; les deux suivantes évoquaient les limites épistémologiques d’un article paru dans le « Journal of Nutritional Science ».

Cent étonnements de ce type traversent le livre de Guillaume Vallet, « la Fabrique du muscle », paru aux éditions L’échappée. Ce sociologue, d’abord spécialiste de la Suisse et de la monnaie (comme quoi), y décrit un fait de société devenu majeur : on estime, en France, à sept millions le nombre de personnes adhérentes à des salles de sport. La pandémie n’a fait que freiner temporairement l’ouverture de nouvelles structures, que ce soient des salles low cost ou des boxes de crossfit. Certes, beaucoup de gens, après s’être inscrits sur un coup de tête, perdent l’envie d’aller tirer ou pousser sur des machines (il fait nuit tôt en janvier), mais tout de même, il y a là un phénomène intéressant à observer (...).

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