04/04/23

« Les racines de la liberté »

Recension des Racines libertaires de l'écologie politique de Patrick Chastenet par Le phénix sur Agora Vox.

Le monde occidentalisé s’est construit jusqu’alors sur un consentement collectif fondé sur l’aspiration au « Progrès » (surtout « social », s’agissant des populations, et technique, pour d’autres intérêts...) selon une certaine norme de consommation plus ou moins étendue. Des pionniers de « l’écologie » avaient prévenu que l’ébullition consumériste et productiviste ne pouvait être maintenue indéfiniment sans dévitaliser notre socle commun d’existence. Patrick Chastenet propose de nous ressourcer dans la pensée de cinq d’entre eux pour nous rappeler que l’amour de la nature est indissociable de celui de la liberté.

Comment pourrait-on parler d’ « écologie » ou de préservation de l’environnement sans en appeler à une vie digne d’être vécue, c’est-à-dire vraiment libre et assurée de l'essentiel ?

Dans la longue et sinueuse édification menant à l’écologie politique, Patrick Chastenet propose un ressourcement dans un terreau libertaire et fécondant, à partir du parcours fécond de cinq penseurs qui se rejoignent dans la « critique radicale du capitalisme techno-industriel » dont ils avaient anticipé en leur temps les maux et méfaits. Pour eux, on ne peut « prétendre protéger la nature en défendant l’économie qui la détruit » - et sans un « changement de société ».

Professeur émerite en science politique à l’université de Bordeaux où il a fondé le premier cours de pensées politiques écologistes, Patrick Chastenet rappelle que le terme « libertaire » est indissociable de celui d’ « anarchiste », fâcheusement connoté et arbitrairement amalgamé à la vague notion de « chaos ». Or, « les anarchistes n’ont jamais cessé de rappeller la nécessité de règles, librement consenties, pour vivre en société ». Parfois stigmatisés comme « ennemis de la démocratie », les anarchistes « le sont d’autant moins qu’ils souhaitent non la détruire mais la réaliser pleinement  ».

Ainsi, le géographe et « penseur sans frontières » Elisée Reclus (1830-1905) décrivait l’anarchie comme « la plus haute expression de l’ordre ». L’anarchie n’est pas seulement l’absence d’un appareil d’Etat mais « l’idéal à atteindre pour qu’enfin les hommes puissent se gouverner eux-mêmes, sur la base de normes et de valeurs librement consenties ». Pour Elisée Reclus, il s’agit de passer d’une société «  foncièrement injuste à une société juste sans recourir à la violence ni même à la contrainte  ». Car, après tout, « pourquoi ne pas faire fleurir une petite oasis de paix, de respect mutuel, d’égalité au milieu de l’immense désert ? »

Dès 1864, il publie dans la Revue des Deux Mondes un texte "écologiste" avant la lettre : « Nous sommes les fils de la terre. C’est d’elle que nous tirons notre subsistance ; elle nous entretient de ses sucs nourriciers et fournit l’air à nos poumons (...) quelle que soit la liberté relative conquise par notre intelligence et notre volonté propre, nous n’en restons pas moins des produits de la planète  »

Pour ce parfait contemporain de la création de la police scientifique, « toute obéissance est une abdication » puisqu’il est « impossible de concilier la domination d’un seul et l’entraide fraternelle entre les hommes ». La police et la science entre des mains aussi malveillantes qu'inintelligentes s’emploieraient à « changer la France en une grande prison »... Tout ça pour les seuls intérêts de ceux qui s’accaparent et privatisent « la moindre grotte, cataracte ou curiosité naturelle » réduites à leur exploitation marchande. Et de prophétiser : « On vous fera payer pour écouter le bruit de l’écho »... Voire le droit de simplement... respirer ? Le processus est engagé... (...).

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