« Le municipalisme libertaire : une nouvelle politique communale ? »
Extrait de Pouvoir de détruire, pouvoir de créer de Murray Bookchin proposé par la revue Topophile.
1995, Murray Bookchin expose ce que serait la structure politique d’une société écologiste et libertaire, c’est-à-dire décentralisée et autogérée. La commune apparaît alors comme la base d’une société libre et d’une individualité authentique. Individualité et communauté s’intriquent et s’élèvent l’un l’autre sans domination dans un processus d’autoformation. « La commune, écrit Bookchin, est la cellule vivante qui forme l’unité de base de la vie politique et de laquelle tout procède : la citoyenneté, l’interdépendance, le fédéralisme et la liberté. » « Elle constitue, poursuit-il, le lieu de parole au sein duquel les gens peuvent se confronter les uns aux autres intellectuellement et émotionnellement, se connaître à travers le dialogue, le langage du corps, l’intimité et l’échange face à face, afin de prendre des décisions collectives. » Engagement, responsabilité, liberté, solidarité ou philia, autoformation ou paideia s’épanouissent dans le municipalisme libertaire.
Les deux sens du mot « politique »
Il existe deux manières de comprendre le mot « politique ». La première, classique, définit la politique comme un système de rapports de pouvoir géré de façon plus ou moins professionnelle par des gens qui s’y sont spécialisés, les soi-disant « hommes politiques ». Ils se chargent de prendre des décisions qui concernent directement ou indirectement la vie de chacun d’entre nous, et ils mettent en œuvre ces décisions au moyen de structures gouvernementales et bureaucratiques.
Ces « hommes politiques » et leur « politique » sont habituellement considérés avec un certain mépris par nombre d’Américains. Ils accèdent au pouvoir à travers des « partis », c’est-à-dire des bureaucraties fortement structurées qui prétendent « représenter » les gens – et parfois, une seule personne en « représente » beaucoup, comme les représentants ou les sénateurs. On les appelle les « élus », traduisant ainsi en termes politiques une vieille notion religieuse, et ils forment en ce sens une véritable élite hiérarchique, malgré leur prétention de parler « au nom du Peuple ». Ils ne sont pas « le Peuple ». Ce sont, au mieux, ses « représentants », ce qui les met à part de celui-ci, et au pire, ses manipulateurs, ce qui les met en travers de la volonté du peuple. Souvent, ce sont des spéculateurs, des émissaires des grandes entreprises, des classes dirigeantes et des lobbies en tout genre. Souvent aussi, ce sont des personnages répugnants qui se conduisent de façon immorale, malhonnête et élitiste dans les médias, et trahissent régulièrement leurs engagements programmatiques au « service »des gens. En revanche, ils sont ordinairement fort utiles aux groupements qui défendent des intérêts particuliers (généralement ceux des nantis), grâce auxquels ils espèrent faire progresser leur carrière et leur confort matériel (...).
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