« La technique a-t-elle tué l’art ? »
Recension de L'Empire du non-sens par Frédéric Manzini dans Philosophie Magazine.
Dans son premier ouvrage, L’Empire du non-sens, le philosophe français Jacques Ellul (1912-1994) se demande ce que devient l’art dans une société contrôlée par la technologie ? Le constat est sévère. Quelles sont les principales idées de cet ouvrage important ?
Critique d’art, Jacques Ellul ? Certainement pas, lui qui dénonce les critiques d’art comme les artifices récents de la société moderne dont les bourgeois, incultes et philistins, ont besoin de guides pour leur expliquer ce qui a de la valeur et ce qui n’en a pas. Bien que L'Empire du non-sens fasse de multiples références aux artistes du XXe siècle, c’est l’art en général – et sous toutes ses formes – que Jacques Ellul aborde, moins en esthète qu’en anthropologue, c’est-à-dire en analyste critique de l’état de notre civilisation.
Notre époque est caractérisée par une spectaculaire prolifération d’objets de toutes sortes. « Nous vivons dans un univers d’objets produits par la technique », constate Ellul, qui entend mesurer les répercussions de cet envahissement : plus le « machinisme » se développe, explique-t-il, plus l’être humain se sent dépossédé de lui-même par une société de consommation devenue aliénante. On pourrait donc espérer de l’art qu’il soit le lieu privilégié pour s’opposer à cette tendance mortifère. Mais est-ce ce vraiment qui se passe ? Pas du tout, car la manière que l’art a de contester l’invasion de la technique en fait un sous-produit ou une expression de cette technique même. [...]
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