« “La pornographie est une pièce maîtresse du capitalisme actuel” »
Entretien avec Romain Roszak, auteur de La Séduction pornographique, par Samuel Lacroix dans Philosophie Magazine.
Parmi le panel de raisons invoquées pour expliquer la baisse globale de l’activité sexuelle, le rapport de plus en plus massif à la pornographie revient souvent. Mais de quoi parle-t-on exactement ? Quel est le véritable pouvoir de ces images et à quelle logique répondent-elles ? Nous avons interrogé le philosophe Romain Roszak, auteur de La Séduction pornographique (L’Échappée, 2021), pour le comprendre.
De récents rapports et sondages montrent que la sexualité diminue partout et chez tout le monde, notamment chez les jeunes. La pornographie pourrait faire partie des raisons. Qu’en pensez-vous ?
Romain Roszak : Il serait un peu naïf de croire que la pornographie n’a rien à voir dans cette baisse tendancielle de la sexualité, ne serait-ce que parce que ceux qui la promeuvent n’ont pas intérêt à ce qu’on arrive à faire l’amour nous-mêmes. Avoir des relations sexuelles avec autrui ne crée pas de valeur, et les industriels de la pornographie se doivent de nous exproprier de nos propres corps et de nos propres désirs pour nous vendre des stimulations extérieures dont nous aurions prétendument besoin. Un pas a été franchi en ce sens durant les confinements, avec une surconsommation pornographique accompagnée d’opérations de communication fortes des plateformes qui ont joué la connivence avec les usagers. Ce fut un moment durant lequel beaucoup de personnes ont pris conscience de la facilité caractéristique de cette dimension de la vie affective et sexuelle dans laquelle il n’y a par définition pas de refus, pas d’engagement, quelque chose de finalement très « cocon ».
De quoi parle-t-on, d’ailleurs ? Qu’est-ce que la pornographie ?
Cette question a historiquement été plutôt prise en charge par ses contempteurs, ce qui rend l’affaire délicate. Car vouloir condamner la pornographie amène à mobiliser un certain nombre de critères, notamment de degrés de monstration ou d’équivoque, qui se révèlent souvent arbitraires (...).
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