« La politique, sa disparition, sa survie »
Un article de Roger-Pol Droit sur Le Néant et le politique dans Le Monde des Livres.
« De discours officiels en commentaires médiatiques, on célèbre l'évanouissement de la politique. Sans qu'on entende beaucoup de refus critiques de cette éviction. Sans que les philosophes se bousculent pour en dénoncer les dangers et en démonter les subterfuges. C'est pourquoi il est intéressant de lire l'essai, atypique et corrosif, d'Harold Bernat. Cet agrégé de philosophie n'aime pas du tout les artifices innombrables qui s'efforcent de nous faire croire que le monde est définitivement lisse, l'histoire désormais uniforme, la pensée aussi apaisée que la société, à jamais stabilisée. Au contraire, il est convaincu que tenter de réduire ainsi à néant tout ce qui est négatif revient à tuer à la fois l'histoire, l'humain et la politique. Car cette dernière consiste en affrontements permanents sur le sens – celui de la vie collective, de l'histoire commune et de l'avenir à construire. Alors le philosophe proteste, pourfend, démonte. Sa cible affichée : Emmanuel Macron, considéré comme symptôme ultime de la néantisation des conflits. [...] Ce livre caustique irritera sans doute. Mais pas nécessairement pour les motifs les plus essentiels. Car son objet principal n'est ni la personne du président, ni les mesure qu'il propose, ni même le mouvement qu'il a fondé. C'est avant tout la défense et illustration de la nécessité vitale d'une pensée critique. »