« La photo numérique, une force néolibérale ? »
Entretien d'André Rouillé, auteur de La Photo numérique, par Pauline Porro dans Marianne.
Dans "La Photo numérique. Une force néolibérale" (L'Échappée), l'historien et théoricien de la photographie André Rouillé propose une approche critique de la photo numérique et interroge les liens de cette dernière avec le néolibéralisme.
Marianne : Pourquoi qualifier la photo numérique de force ?
André Rouillé : Contrairement aux photos-argentiques qui étaient des choses figées et immobiles, les photos-numériques ont en commun avec les forces d’être processuelles, incorporelles, communicationnelles et agissantes. De l’une à l’autre photo, on passe de l’univers des choses à celui des flux et des forces.
Comment expliquer la fulgurance avec laquelle la photo argentique s'est fait évincer au profit de la photo numérique ?
Au milieu du XIXe siècle, la photo-argentique a introduit dans le champ des images les protocoles et les valeurs de la société industrielle. Elle a connu des évolutions techniques (en degrés) très importantes. Mais son matériau photo-chimique et ses protocoles de production-diffusion sont restés ceux qui prévalent dans le champ des choses. Elle était inadaptée à la société néolibérale d’aujourd’hui où dominent l’ouverture et l’accélération du monde ; où les flux, les réseaux planétaires et les vitesses prévalent sur les choses et les valeurs de l’industrie. Ainsi frappée d’une brutale et irrémédiable obsolescence, la photo-argentique a été évincée par la photo-numérique, qui s’est imposée à partir de 2007 avec les premiers smartphones.
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